mardi 29 avril 2008

Les commentaires qui font plaisir

  • "Quand même, apprendre tout ce texte, ça doit pas être facile"
  • "Ca fait longtemps que vous travaillez dessus?"
  • "Les costumes étaient très bien"
  • "C'était bien, tu vois, je ne me suis pas ennuyé".

vendredi 10 août 2007

A la recherche d'un texte...

Je cherche un texte à monter avec ma petite troupe. 2 à 3 hommes et 1 femme.

Pas simple. Pas encore trouvé.
Si quelqu'un a une suggestion, je suis preneur!

Ce que j'ai lu ces derniers temps pendant ma quête:

  • The Cocktail Party, T.S. Eliot: Pas sûr que la pièce ait été traduite en français. La tentative d'Eliot de partir d'un genre de drame bourgeois très conventionnel (et plutôt drôle) et de le frotter à une dimension tragico-mystique ne fonctionne pas très bien à mon sens. Mais il y'a de très beaux passages.

  • L'absence de Guerre, David Hare: Excellente pièce qui suit la campagne d'un leader travailliste face au gouvernement conservateur sortant. Ressemble tellement aux problématiques du PS que c'en est terrifiant.

  • Vêtir ceux qui sont nus, Luigi Pirandello. Pièce intéressante, moins complexe à monter que les pièces plus connues de Pirandello. Beau personnage féminin.

  • An Inspector Calls, J.B. Priestley. Fausse pièce policière mais vraiment moraliste. Une pirouette marrante et personnage d'inspecteur odieux sans doute rigolo à jouer mais le tout est trop pesant.

  • L'impromptu de l'alma, Ionesco. Satire indigèste de la critique.

  • Black Comedy, Peter Shaffer: Principe très intéressant: début de la pièce dans le noir avec comédiens qui semblent parfaitement à l'aise. Puis panne d'électricité et les lumières s'allument pour les spectateurs tandis qu'elles s'éteignent pour les protagonistes! En soi, c'est très prometteur en termes de jeu avec la possibilité de jouer 'gros' puisque les personnages ne sont pas sensés se voir les uns les autres mais la trame est lourdingue.

  • White Lies, Peter Shaffer: Pendant de la précédente. Pas passionant.

  • 5 finger exercise, Peter Shaffer: Drame familial assez méchant avec de bons passages.

  • Knives in Hens, David Harrower: paysanne qui découvre l'amour et la poésie. Texte faussement compliqué. Bof.

Infaillibilité du comédien.

Un ex-collègue a un jour assisté au malaise d’une grande comédienne sur scène. Il a passé une soirée formidable. Les pompiers sont arrivés et ont voulu évacuer la grande comédienne. Celle-ci a refusé : show must go on oblige. Elle est ensuite resté encore une heure seule en scène...
La martyrologie ne m'est pas une discipline très sympathique. C'est douleureux d'être artiste mais n'attendons pas de voir des artistes souffrir pour les applaudir et ne les applaudissons pas parce qu'ils souffrent.

Mon ex-collègue a présenté ça comme sa plus forte expérience de théâtre… Le fait que la pièce était de EE Schmitt n’enlève rien au fait que le malaise d’une grande comédienne n’aurait pas du être le clou de la soirée.

mardi 19 juin 2007

Faillibilité du comédien

Edward Gordon Craig caressait un objectif louable et naturel de perfection dans l’expression. Par prolongement, il condamne le comédien et sa faillibilité souhaitant le remplacer (un peu, beaucoup, par provocation) par une sur-marionnette, soit une chose capable de reproduire à l’envie une expression intense et juste et dont on devine que les fils seront tenus par le metteur en scène. Trois choses à ce sujet :

  • D’abord, il est clair que l’erreur dans un spectacle achevé ne peut être que nuisible mais cette idée d’un spectacle achevé demande déjà à être discutée.
  • Ensuite, l’erreur fait partie du processus créatif et, si on ne souhaite pas la retrouver dans le produit fini, il faut tout de même l'admettre dans la recherche qui y mène.
  • Enfin, l’éradication de l’erreur ne doit pas nous transformer en ces amateurs sadiques d’opéra qui n’y vont que pour dénoncer les couacs et qui repartent déçus d’une soirée qui en est dépourvue.

mardi 12 juin 2007

Ressources pour trouver des Textes de Théâtre

Où trouver des textes de théâtre pour vos pièces?:

A Paris (désolé pour les non-parisiens):

  • La Librairie Théâtrale, 3 rue Marivaux 75002. Très gros spécialiste avec livres neufs et quelques uns d'occasion.
  • Le Coupe Papier, 19 rue de l'Odéon 75006. Fonds moins important mais tout de même conséquent et fichier disponible avec commentaires sur pièce et infos sur le nombre de personnages etc... (à demander aux libraires).
  • Libraire du Théâtre du Rond-Point: 2bis av. Franklin D. Roosevelt 75008 Paris. Fonds conséquent. A le gros avantage de fermer tard en semaine (23h)

En ligne:

lundi 11 juin 2007

Sauver Artaud de la Cruauté

Parler de cruauté, au théâtre, c’est parler d’Artaud. En toutes circonstances, c’est Artaud. La cruauté, c’est lui. C’est son truc. Le terme « cruauté » figure dans un ouvrage ? C’est qu’il s’inspire d’Artaud. Le texte a été écrit avant la naissance d’Artaud ? Et bien il le préfigure ! Mais Artaud, c’est ça : c’est la cruauté. La cruauté, c’est lui.
Je n'en pouvais plus de trouver Artaud et la Cruauté systématiquement enlacés dans mes lectures théâtreuses. Alors je suis allé voir l'origine du Mal:

Le théâtre et son double (Folio Essais)



P128 : Je propose donc un théâtre où des images physiques violentes broient
et hypnotisent la sensibilité du spectateur pris dans le théâtre comme dans un tourbillon de forces supérieures.

Un théâtre qui abandonnant la psychologie raconte l’extraordinaire, mette en scène des conflits naturels, des forces naturelles et subtiles, et qui se présente d’abord comme une force exceptionnelle de dérivation. Un théâtre qui produise des transes, comme les danses de Derviches et d’Aïssaouas produisent des transes, et qui s’adresse à l’organisme avec des moyens précis, et avec les mêmes moyens que les musiques de guérison de certaines peuplades que nous admirons dans les disques mais que nous sommes incapables de faire naître parmi nous.
Il y a là un risque, mais j’estime que dans les circonstances actuelles il vaut la peine d’être couru. Je ne crois pas que nous arrivions à raviver l’état de choses où nous vivons et je ne crois pas qu’il vaille quelque chose pour sortir du marasme, au lieu de continuer à gémir sur ce marasme et sur l’ennui, l’inertie et la sottise de tout.

D'abord, la deuxième partie de la citation d'Artaud nuance la force de cette notion de cruauté. Le fond du projet semble plutôt être un "théâtre qui raconte l'extraordinaire" en abandonnant le schéma discursif. Exhiber de la cruauté n'est que son moyen de choix pour cela et je dirais qu'en ça, Artaud a manqué d'imagination. Je ne crois pas à cette thérapie. D'ailleurs Artaud lui-même dit qu'il y'a un risque et semble affirmer que ce n'est qu'une solution temporaire, un électochoc pour ranimer le théâtre moribond. Ensuite, penser que les insuffisances du théâtre et de ses praticiens doivent être palliées par un choc administré au public me paraît curieux…

Heureusement, Artaud, c’est plus que cela. Sa langue a produit des fulgurances qui rappellent que l’art aussi doit justifier de son existence. Héritage bien plus précieux me semble-t-il.


P11 : Le plus urgent ne me paraît pas tant de défendre une culture dont l’existence n’a jamais sauvé un homme du souci de mieux vivre et d’avoir faim, que d’extraire de ce que l’on appelle la culture, des idées dont la force vivante est identique à celle de la faim.


P19 : Aussi bien, quand nous prononçons le mot de vie, faut-il entendre qu’il ne s’agit pas de la vie reconnue par le dehors des faits, mais de cette sorte de fragile et remuant foyer auquel ne touchent pas les formes. Et s’il est encore quelque chose d’infernal et de véritablement maudit dans ce temps, c’est de s’attarder artistiquement sur des formes, au lieu d’être comme des suppliciés que l’on brûle et qui font des signes sur leurs bûchers

P.S: Grotowski a un court essai remarquable sur Artaud dans Vers un Théâtre Pauvre (l'Age d'Homme)

mardi 5 juin 2007

Incarner/Jouer un personnage?

Substituer incarner à jouer a une vertu : insister sur le rôle prépondérant du corps dans le travail de l’acteur. C’est à peu près tout. Et c’est une vertu qui se dissipe rapidement tellement l’importance du corps dans la performance devient une évidence avec un peu de pratique et des conseils de comédiens professionnels.
Cette vertu éphémère ne fait pas le poids face à l’insuffisance de cette représentation du travail de l’acteur. D’abord parce que le jeu expressionniste (entre autres) est tout sauf une incarnation. (il y’a bien corps, structure mais pas chair). Ensuite parce qu’il y’a Jouvet :

Le comédien désincarné (Flammarion)

P59 : Il faut attirer son [l’élève] attention sur ses propres
sentiments, éveiller en lui la vision d’un personnage, et en même temps
la conscience de sa propre sensibilité
.

P59 : La décomposition des différents sentiments d’une scène est un exercice très heureux aussi dans ce sens. Le débutant à tendance à tout exprimer d’une façon liée, croyant de bonne foi qu’il fait des nuances. Le passage d’un sentiment à un autre comporte
des changements internes chez l’exécutant qu’il faut lui faire éprouver en lui-même. Cette mosaïque, cette succession d’états est efficace pour lui faire prendre contact avec lui-même. Dès que ses premières pudeurs sont effacées, l’assurance que prend le débutant fait qu’il exécute dans une sorte de jaillissement où il perd la notion de lui-même. En se délivrant, en s’extériorisant violemment, il fuit dans le personnage et se fuit lui-même. Il se perd.
Seul est important ce moment fugitif où la surveillance intérieure qu’il a de ses sentiments par rapport à l’imagination d’un personnage, à ce squelette de sentiments et de gestes qu’on lui a dessiné, ce plan, ce schéma psychologique, lui donne tout à coup le sentiment d’être ou n’être pas à l’unisson de ce qu’il cherche à être et à exprimer.


Penser ainsi que l’on joue plutôt que l’on incarne, c'est-à-dire qu’on ne prétend pas devenir un autre mais qu’on se place en tension avec un objectif de jeu, me paraît trivialement plus proche de la réalité du travail de comédien.
Plus fondamentalement, et c’est là que je voulais en venir, cela permet de penser le jeu comme débordant le cadre du théâtre. L’incarnation n’a de sens que circonscrite dans le cadre du théâtre ; le jeu et sa discipline tels que les décortique Jouvet, peuvent se concevoir en dehors du théâtre et devenir :

« un procédé d’exécution perfectible et d’autre part un moyen de se perfectionner [soi]-même. » (P59)


C’est ainsi que j’aime à comprendre cette phrase célèbre de Jouvet :

P41 : On fait du théâtre parce qu’on a l’impression de n’avoir jamais été soi-même, de ne pas pouvoir être soi-même et qu’enfin on va pouvoir l’être.


Comme un projet de comédien et un projet de vie.